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Des Chauves-Souris pour lutter contre les insectes ravageurs de la vigne

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Depuis quelques années, la piste de la chauve-souris pour lutter contre les ravageurs de la vigne progresse. La piste est prometteuse quand on sait qu’une chauve-souris peut ingurgiter jusqu’à la moitié de son poids en insectes variés en une seule nuit…

Une espèce encore fragile

Les chauves-souris sont des mammifères nocturnes et insectivores. Ce sont d’excellents auxiliaires de culture, prenant le relais des oiseaux à la tombée de la nuit dans la régulation des populations d’insectes.

Sur les 34 espèces présentes en France, 24 ont été observées en Bourgogne. Malheureusement, leur situation est fragile. On estime que les populations actuelles représentent 25% des populations des années 1950 au niveau national, s’expliquant principalement par les changements importants dans le paysage français et aux pratiques agricoles intensives (insecticides, suppression des haies…). D’autres facteurs, comme la pollution lumineuse, les axes de transport ou encore la diminution du nombre de gites (fermeture des bâtiments, aménagement de combles) ont accentué cette disparition progressive (1).

Des solutions existent pourtant pour limiter leur disparition et contribuer à la remontée des effectifs de chauves-souris. L’une d’entre elles consiste à améliorer l’accueil de ces mammifères dans des endroits « refuges » en aménageant des espaces ou en introduisant des gîtes artificiels.

La chauve-souris, une solution contre les tordeuses de la vigne ?

En Bourgogne, une quinzaine d’espèces seraient présentes dans les vignes et consommeraient divers insectes (2). Pour le moment, on ne sait pas quelles espèces sont consommées, mais certains ravageurs parfois très contrariants pourrait être concernés (tordeuses, drosophiles Susuki…).

Plusieurs programmes de ré-introduction de chauves-souris ont donc été lancés en France, avec pour objectif de quantifier la prédation sur les tordeuses et d’identifier les facteurs favorables à la fréquentation des vignes par les chauves-souris.

Un exemple d'initiative en Saône-et-Loire

Cette problématique, Xavier Moissenet, vigneron Bio à Bouzeron en Saône-et-Loire (71), l’a bien comprise. Sensible à la protection de l’environnement, Xavier s’installe directement en bio en 2014 et cherche depuis à favoriser la biodiversité dans ses vignes.

En 2016, il contacte la Société d’Histoire Naturelle d’Autun (SHNA) avec l’idée d’introduire des gîtes artificiels pour chauves-souris (nichoirs) sur son domaine. L’objectif est donc double : fournir un habitat pour une espèce animale en déclin et lutter contre certains ravageurs de la vigne en introduisant des auxiliaires de culture.

Mais Xavier veut aller plus loin. Souhaitant sensibiliser sur cette problématique, il se rapproche de l’école primaire de Saint-Martin, à Chagny, pour amener les enfants à réfléchir au métier de viticulteur et à la gestion des ravageurs (des « bebettes ») dans les vignes. En coopération avec les instituteurs de l’école, il organise une première journée avec les deux classes de l’école (CP-CE1-CE2 et CM1-CM2). Au programme, une introduction ludique sur les vignes et les ravageurs, puis des ateliers pour amener les élèves à trouver par eux-mêmes des solutions aux problèmes de ravageurs dans les vignes de Xavier. Après plusieurs pistes des plus inventives (filets géants, pistolets lasers…) et légèrement guidés par Xavier, les élèves réfléchissent aux auxiliaires de cultures, et notamment aux chauves-souris. L’occasion pour les instituteurs de faire des ponts avec différentes matières : biologie animale ou encore mathématiques avec des calculs de besoins en Chauves-souris par hectare. La journée se termine par la promesse d’aller voir Xavier sur son domaine pour installer des Gîtes pour les Chauves-Souris.

Pour concrétiser ce projet, Xavier prend contact avec le Foyer Marie-José Marchand, foyer d’accueil pour adultes handicapés de Givry, dont l’une des activités est le travail du bois. La Société d’Histoire Naturelle d’Autun lui fournit les plans de gîtes adaptés aux espèces de la région. La production d’une dizaine de gîte est alors lancée : les pièces en bois sont fabriqués par les pensionnaires du foyer et le montage est finalisé avec les enfants. En Avril 2017, une sortie scolaire est organisée pour installer les nouveaux habitats dans les vignes de Xavier, où 5 nichoirs sont finalement installés.

La suite ? Il faut attendre maintenant… Les nichoirs seront surveillés et si ils sont habités, le guano (déjection de la chauve-souris) sera analysé pour savoir quels insectes ont été consommés.

Mais Xavier aimerait d’ores et déjà « essaimer cette solution à une échelle plus large ». Membre du groupe DEPHY Côte Chalonnaise animé par Bio Bourgogne, il souhaite sensibiliser ses collègues viticulteurs du groupe, qui pourraient profiter de son partenariat avec le foyer Marie-José Marchand pour commander des nichoirs (15 euros l’unité).  Cette solution, si elle ne peut résoudre tous les problèmes de ravageurs, pourrait permettre de favoriser la biodiversité et les auxiliaires de culture dans un secteur plutôt sensible aux tordeuses de la vigne.

Auteurs et Crédits photos :

Maxime HARAN

Animateur – conseiller Viticulture Biologique
BioBourgogne

Xavier Moissenet

Domaine les Champs de Thémis, Bouzeron (71)

Sources

(1) « Les Chauves-souris de Bourgogne », SHNA (société d’histoire naturelle d’Autun), livret de 20 pages édité en décembre 2016.

(2) Gilles Santenac, IFV Beaune, dans un article paru dans Viti n°419 d’octobre 2016.

www.mon-viti.com/articles/viticulture/utiliser-les-chauves-souris-pour-lutter-contre-les-insectes-ravageurs-en-vigne